On hérite en partie du microbiote intestinal, preuve chez les porcs

On hérite en partie du microbiote intestinal, preuve chez les porcs

Le microbiote intestinal est composé d’un ensemble de milliards de microorganismes qui se constitue après la naissance chez les humains et les animaux. Si on sait que l’environnement, notamment l’alimentation, influence grandement la formation et la composition du microbiote, l’influence de la génétique est encore débattue. Pour la première fois, des scientifiques d’INRAE prouvent expérimentalement, chez le porc, que la formation du microbiote intestinal est en partie héritable. Ils ont sélectionné 2 lignées de porcs pour 2 types de microbiote intestinal caractérisés par leur composition bactérienne. Les résultats, publiés dans la revue Microbiome, montrent que la fréquence de chaque type de microbiote augmente de génération en génération dans chaque lignée. Un autre enseignement est que, pour un des types de microbiote, la sélection favorise une croissance plus rapide des porcelets. Ces résultats ouvrent des perspectives pour la prise en compte du microbiote intestinal dans les schémas de sélection des animaux pour un élevage plus durable et résilient.

Le microbiote intestinal est un écosystème de plusieurs centaines d’espèces microbiennes (bactéries, levures…) qui se construit progressivement après la naissance chez les animaux et les humains. Si la composition du microbiote intestinal est propre à chaque individu, des études récentes chez les humains et les animaux ont mis en évidence que la variété des microbiotes observée au sein d’une population peut être regroupée en grandes catégories présentant des caractéristiques similaires en termes de groupes bactériens représentés. On considère souvent que l’environnement, en particulier l’environnement maternel à la naissance, et l’alimentation sont les principaux facteurs influençant la composition du microbiote chez les jeunes. En revanche, l’importance des facteurs génétiques de l’hôte sur son microbiote est encore débattue car mal évaluée. Pour la première fois, une équipe d’INRAE a sélectionné 2 lignées de porcs dont les géniteurs ont été choisis selon 2 types de microbiote intestinal. Les scientifiques ont ainsi étudié l’influence des facteurs génétiques sur la formation du microbiote intestinal de 1 000 porcs sur 3 générations.

Des lignées de porcs sélectionnés sur leur microbiote intestinal

Afin d’évaluer s’il est possible de sélectionner les porcs pour la composition de leur microbiote intestinal, les scientifiques ont dans un premier temps mis en évidence qu’il est possible de répartir des porcelets âgés de 60 jours en 2 groupes correspondant à 2 types de microbiote appelés entérotypes. Chaque entérotype est caractérisé par une surabondance relative de 2 genres bactériens : Prevotella et Mitsuokella pour l’entérotype PM, et Ruminococcus et Treponema pour l’entérotype RT. Pour la mise en place des 2 lignées sélectionnées, les reproducteurs ont été choisis à partir d’une analyse de fèces, pour retenir ceux qui avaient un microbiote de type PM ou RT. Puis les porcelets des 2 lignées ont été élevés exactement dans les mêmes conditions (même lieu, même nourriture).

Les résultats montrent que dans la lignée sélectionnée pour l’entérotype PM, la fréquence de cet entérotype est passée de 53 % dans la population initiale avant sélection à 87 % après 3 générations ; dans l’autre lignée, la fréquence de l’entérotype RT est quant à elle passée de 47 % à 70 %. Des analyses de la vitesse de croissance des 2 lignées montrent que les porcs sélectionnés sur le microbiote de type PM ont une croissance plus rapide jusqu’à 70 jours d’âge. Une analyse plus approfondie a révélé que les 2 entérotypes contiennent des bactéries ayant des activités métaboliques différentes. L'entérotype PM est notamment plus riche en gènes bactériens capables de dégrader l'amidon, de métaboliser les sucres et de synthétiser des acides aminés importants. Grâce à ces 2 lignées de porcs, les travaux vont se poursuivre pour étudier la stabilité des entérotypes au cours de la vie des animaux et leur influence sur la production, la santé et le comportement des porcs.

Ces résultats prouvent que la génétique de l’animal a une influence importante sur la formation de son microbiote intestinal et que sa composition ne dépend pas que de l’environnement. Ils confirment l’intérêt de prendre en compte le microbiote intestinal dans les schémas de sélection pour améliorer la durabilité et la résilience en élevage.

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Référence :

Larzul C., Estelle J., Borey M. et al. (2024). Driving enterotypes through host genetics. Microbiome 12, 116 DOI : https://doi.org/10.1186/s40168-024-01827-8